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«On m’a donné seize prisonniers pour les remettre à la division. Je n’en ai amené que deux seulement. Les autres ont été mangés par les ténèbres.»

Lettre de Nico Théophilatos, officier de l’armée grecque, deuxième guerre balkanique, 11 juillet 1913.

Nedžad avait seize ans quand la «zone de sûreté» de Srebrenica est tombée entre les mains de l’armée serbe, le 11 juillet 1995. Avec les 13.000 hommes présents dans l’enclave, il décide de fuir à travers les collines et les forêts dans l’espoir de gagner le territoire bosniaque, à 50 km de là. Mais après deux jours de fuite désespérée, pilonnés par l’artillerie serbe et affamés, des milliers de civils préfèrent se rendre. Nedžad est parmi eux. Avec des milliers d’autres prisonniers, il est retenu dans des camions bâchés, sans eau malgré la fournaise de l’été. Après deux jours, les camions arrivent dans une école primaire. Les hommes sont entassés dans les classes. Ils boivent leur urine pour ne pas mourir de soif. La nuit venue, les Serbes les font remonter dans les camions. Leur destination est un barrage tout proche de là.

En arrivant sur place, Nedžad comprend le sort qui leur est réservé. Des centaines de corps jonchent le sol. Les soldats les font sortir et s’allonger avant de les fusiller. La fusillade dure le temps de vider tous les camions, puis les soldats repartent. Nedžad est touché au flanc et au pied, mais il n’est pas mort. Il rampe sur les corps, aide un autre miraculé à se défaire de ses liens. Pendant quatre jours, ils fuiront à travers les bois, se cachant dans les ruines et les cimetières, avant d’atteindre le territoire bosniaque.

Aujourd’hui, Nedžad a 36 ans. Il est marié et père de deux petites filles. En 2007, après des années d’exil, refusant de s’installer à l’étranger, il a décidé de revenir vivre à Srebrenica. Il ne pouvait s’imaginer vivre loin de cette terre où reposent tous ses proches. Et malgré les difficultés du quotidien, il croit en un avenir meilleur pour lui et sa famille.

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